Covid-19 : le président du Conseil scientifique accuse le gouvernement de n’avoir pas dit « la réalité » sur les masques
Alors que la Cour de justice de la République l’interrogeait sur la gestion des masques en mars 2020, le président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy, a affirmé que le gouvernement n’avait pas dit « la réalité » aux Français, révèle Le Point.

Le président du Conseil scientifique dédié au Covid-19, Jean-François Delfraissy, a tenu des propos sévères à l’égard de l’exécutif, selon les informations du Point. Interrogé, au même titre que les autres membres du Conseil scientifique, par les juges dans le cadre de l’information judiciaire suivie par la Cour de justice de la République (CJR), l’immunologiste aurait estimé que le gouvernement n’avait pas dit « la réalité » aux Français, alors même que ce conseil s’était publiquement gardé de toute remarque politique vis-à-vis du pouvoir.
L’attention de la CJR se porte en particulier sur un possible mensonge du gouvernement, qui avait affirmé que le port du masque en population générale n’était pas nécessaire.
S’agissait-il simplement de faire diversion face à la pénurie de masques et d’équipements de protection individuelle début 2020 ? Les membres du Conseil scientifique ont en tout cas expliqué aux juges qu’ils n’ont étéavertis de cette pénurie ni lors de la réunion à l’Elysée du 5 mars 2020, ni lors de la première réunion officielle du conseil, le 12, alors que la pénurie était connue de Matignon dès janvier. « On a eu les renseignements sur les masques autour du 23-25 mars« , affirme ainsi Jean-François Delfraissy, toujours selon Le Point.
Le journal avait précédemment révélé les mails d’alerte écrits par Olivier Brahic, patron du Centre de crise sanitaire. « Pour les masques, nous allons être confrontés à une pénurie de matière première« , « Warning +++« , avait-il notamment prévenu, dès le 28 janvier 2020. Marc Guillaume, le secrétaire général du gouvernement, écrivait à son tour deux jours plus tard à un proche d’Édouard Philippe : « Nos fournisseurs nous confirment aujourd’hui que leurs stocks sont soit très faibles, soit épuisés, que la Chine a bloqué toutes les exportations… et que le prix du masque a déjà augmenté de 80 % ! » Jérôme Salomon, alors directeur général de la Santé, avait ensuite lancé l’alerte le 6 février.
« On n’était pas suffisamment prêts »
Si Jean-François Delfraissy précise que « d’autres sujets [que les masques] étaient prioritaires à court terme » à ce moment-là, un autre membre du Conseil scientifique, Yazdan Yazdanpanah, raconte qu’il « ne pas qu’il n’y avait pas de masque. La nécessité que toute la population mette des masques, on l’a apprise plus tard, quand on a su que les gens asymptomatiques étaient contaminants. On a dit ça sans savoir s’il y avait des stocks de masques. »
Jean-François Delfraissy a par ailleurs raconté son incompréhension face à l’affirmation par Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement à l’époque, de l’inutilité des masques pour le grand public. « Je n’ai pas bien compris pourquoi, au niveau politique et au niveau communication, ils ne disaient pas la réalité, c’est-à-dire qu’il y avait un nombre restreint de masques et que, compte tenu du confinement, il fallait les réserver au personnel de santé et qu’au fil on étendrait l’utilisation des masques à la population tant pour la protection de soi-même que, quand on l’a su, pour protéger les autres. Je pense que ça aurait pu être plus clair« , a-t-il affirmé. S’il a refusé de répondre à l’hebdomadaire, il a en revanche affirmé devant la CJR qu' »on n’était pas suffisamment prêts pour une pandémie de cette importance« .